Deux heures à la gare de Paris entre deux trains...
J'avais peur de m'ennuyer, mais voilà que la SNCF met un piano à disposition du chaland. "A vous de jouer", ça s'appelle. Coup de bol, le chaland d'aujourd'hui, il joue comme un dieu, on ne peut plus l'arrêter ! Par contre, les voyageurs alentour s'arrêtent, eux, comme hypnotisés. Moi aussi...
A moi de jouer. D'abord en rythme avec la musique, direct à la plume calligraphique pilot. Un seul trait pour pouvoir guetter les mouvements du pianiste d'un oeil, tout en jetant l'autre sur mes p'tites valises. Debout, toute une organisation, mais quand même, ça vaut le coup !
Et bien ce mec est un magicien, il met tout le monde de bonne humeur. Je compte au moins 30 personnes de tout âge autour de lui, babas d'admiration. Et même un vieux monsieur qui tapote allègrement ses doigts sur son pantalon au rythme d'Adèle : incroyable, je vous dis !
Et puis un jeune gars qui passe subrepticement sa main sur l'épaule de la nana qui l'accompagne : merci qui ? Merci la SNCF !
Un peu de bic 4 couleurs, mélanger sans mélanger, rester lisible, tout un programme...
Avec tout ça, j'ai failli louper mon train !
Dessiner à la dérobée le reflet des voyageurs dans l'étagère "porte-bagages". C'est rigolo parce qu'ils sont à l'envers... Tenter des aplats noirs de cheveux et lunettes brillantes...
Reprendre la tradition estivale du pique-nique au coucher de soleil, ce qui relève toujours un peu du coup de poker en Normandie. Si le ciel est clément, on voit apparaître le rayon vert à l'horizon, comme dans un Jules Verne. Je l'ai vu une seule fois cet été.
Inaugurer des tubes Sennelier. Le vert véronèse est parfait pour la mer. Pour le ciel, la triade de Shari Blaukopf : jaune aureolin, rouge alizarin crimson, bleu outremer.
Sur la colline, il y a des chardons qu'on appelle "peigne à sorcière" en espagnol ! En fait très utiles pour les guérisseuses d'antan. Au large, les pétroliers patientent tranquillement que le cours du pétrole remonte pour rallier le port du Havre.
